Le nouvel album de Cecilia Bartoli est une fois encore un regard sur l’histoire Russe
Eh bien voilà, une nouvelle saison a enfin commencé et le monde de la vie culturelle a de nouveau prit de l’ampleur. Et les nouveautés ne nous attendent pas seulement dans le domaine des expositions artistiques, ou dans celui des concerts ou encore des pièces de théâtres, mais bien dans le domaine de la musique classique. Plus précisément, ce ne sont pas des nouveautés, mais des ouvertures pour le grand public à des noms oubliés de compositeurs d’époques révolues. Je pense bien sûr au nouvel album de la chanteuse d’opéra Cecilia Bartoli, intitulé « St. Petersburg », qui a été présenté au Château de Versailles milieu octobre.
Dans les archives du théâtre Mariinsky, Bartoli a cherché des partitions appartenant à des compositeurs ayant travaillé au sein de la cour russe du XVIII siècle et a retenu 11 œuvres pour son recueil suivant. Le règne de trois impératrices russes l’ont intéressés : Anna Ivanovna, Elisabeth Petrovna et Catherine II, une période, sans aucun doute, en tout très importante dans la culture russe.
Dans son recueil sont entrés trois chefs-d’œuvre de cinq compositeurs : Francesco Araja, Hermann Friedrich Raupach, Vincenzo Manfredini, Domenico Dall’Oglio et Domenico Cimarosa.
En 1735, Araja est arrivé en Russie au sein d’une troupe d’opéra. Il a été l’auteur du premier opéra italien, se déroulant à Saint-Pétersbourg, mais également du premier opéra écrit en russe : l’opéra « Céphale et Procris a été écrit en 1755 d’après le texte de A.P. Soumarokov et dans cette même année il s’est déroulé avec la participation de chanteurs russes. « Alceste », deuxième opéra en russe, a aussi été écrit d’après le libretto de Soumarokov par le compositeur allemand Raupach. Bartoli a retenu deux airs de cet opéra et en a réécrit le début ; elle a chanté en russe pour la première fois dans sa carrière.
Vincenzo Manfredini, qui est en premier lieu arrivé au poste de chef d’orchestre sous Catherine II, a vite été nommé professeur de musique du futur empereur Paul I, mais il n’était alors pas si connu en tant que compositeur. A l’inverse, un autre italien, Domenico Cimarosa, était en son temps, anormalement populaire à travers toute l’Europe, était en son temps anormalement populaire dans toute l’Europe. En 1789 il est arrivé en Russie sous l’invitation du Prince Potemkine mais a beaucoup voyagé durant quelques années, allant à Vienne, puis par la suite en Italie. En Russie, il a composé deux opéras et a écrit une cantate, dédicacée au Prince Potemkine.
Et enfin, Cecilia Bartoli a attiré l’attention du disciple Vivaldi Dal’Olio et du violoniste Madonis, qui ont écrit le prologue de la Clemenza di Tito, de Johann Adolf Hasse, opéra réalisé 50 ans avant la composition du même nom de Mozart. Strictement parlant, ce prologue a été écrit en l’honneur du couronnement d’Elisabeth Petrovna, par conséquent il n’est pas passé inaperçu au sein de l’album.
Bartoli a elle-même choisi les œuvres de son nouvel album, accordant de l’intérêt non pas seulement à la musique baroque mais aussi à l’histoire russe. Ce choix d’époque est peut-être d’autant plus intéressant pour l’étude d’un semblable moment clé : Pierre I a bien ouvert une fenêtre vers l’Europe, mais c’est exactement sous ses successeurs que la culture européenne s’est activement infiltrée dans la vie de la cour impériale russe et a réellement commencé à interagir avec la culture russe, engendrant des œuvres tout au moins originales.
En l’honneur de la sortie du nouvel album, Bartoli a organisé une petite tournée européenne, qui a duré jusqu’à fin novembre. La diva a programmé un concert à Berlin, Amsterdam, Bruxelles, Viennes et dans d’autres grandes villes européennes. Elle n’a également pas évité Paris. Elle donnera, le 1er et le 7 novembre, deux concerts au théâtre des Champs-Elysées.
Les billets pour ses concerts parisiens sont depuis longtemps épuisés, les galeries du métro sont couvertes d’affiches avec une photo d’elle vêtue d’une chapka blanche en fourrure à la russe, quant aux journaux et aux sites d’actualités, ils sont eux remplis de gros-titres intrigants : « Bartoli a-t-elle émigré en Russie ? », « Le nouvel album de Bartoli arborent des accents russes ». Emigration ? Accent ? Mon Dieu !
La musique est en dehors de la politique, de la géographie, et du temps, et pourtant elle apparait souvent comme un produit d’influence dans ces trois secteurs. Voilà un tel paradoxe, et le nouvel album de Cecilia Bartoli en est bien la preuve !
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