Sonia et Robert Delaunay. Rythme en couleur
Pour la première fois depuis 1967 le Musée d’Art Moderne de la Ville de Paris, situé dans une des ailes du Palais de Tokyo, a présenté aux spectateurs une rétrospective de Sonia Delaunay. Delaunay est célèbre notamment pour avoir été la première artiste-femme à recevoir l’honneur d’une exposition personnelle au Louvre. Au total plus de 400 de ses œuvres sont exposées dans l’exposition actuelle, illustrant les diverses périodes de sa longue vie créatrice – de l’aube du XXème siècle à la fin des années 1970.
Originaire d’Odessa, Sara Stern a quitté ses parents tôt et a été élevée par son oncle, un avocat pétersbourgeois Henri Terk. A l’âge de vingt ans, elle s’en va étudier la peinture à Paris. Inutile de dire qu’à l’époque la ville apparaissait comme la capitale mondiale incontestable de l’art et était sur ce plan au-delà de toute concurrence. Les premières œuvres de l’artiste témoignent clairement qu’elle s’inspirait de maîtres modernes. Parmi ceux-ci, bien sûr, on peut nommer Van Gogh, Gauguin, Cézanne, les fauvistes. En 1910 Sara se marie au peintre-abstrait Robert Delaunay et devient alors connue sous le nom de Sonia Delaunay.
Ensemble le couple développe un nouveau style artistique – l’orphisme. C’est une composition abstraite fondée sur des cercles concentriques de couleurs, visant à dépeindre la dynamique de la lumière, du mouvement et du rythme. La combinaison de couleurs sur les toiles crée un effet de pulsation rythmique, d’une musicalité de la peinture. Dans le même mouvement, Sonia se captive pour le textile, créant tantôt des abstractions, brodées au tricot, tantôt des peintures faites de morceaux de tissu multicolores. C’est précisément de ce geste presque d’hooligan qu’est né son travail ultérieur sur les costumes pour l’entreprise théâtrale de Diaghilev. Plus tard, elle a abordé sérieusement la modélisation des vêtements et la création d’esquisses pour tissu, basée sur des compositions de formes géométriques et de couleurs vives. Il faut dire qu’aujourd’hui ses modèles de vêtements pourraient être tout à fait d’actualité. Une autre réalisation encore incontestable de la carrière du couple Delaunay sont les énormes panneaux décoratifs, fabriqués pour l’Exposition Universelle de 1937 à Paris.
Toutes ces étapes de la création de Sonia Delaunay sont visibles dans l’exposition en cours au Musée d’Art Moderne. Ici, les croquis, les toiles, les panneaux décoratifs, les mosaïques et tout dans la même gamme inchangée de l’orphisme. Une salle séparée est consacrée aux esquisses et à des exemples de tissus de l’artiste et de modèles de vêtements, développés par Delaunay (par bonheur pour les accros de la mode, quelques tenues ont été conservées dans leur forme d’origine et exposées dans les vitrines de cette salle).
L’exposition détaillée et fascinante semble particulièrement intéressante pour les visiteurs qui aiment l’art russe d’avant-garde. Après tout à cette époque, l’art russe est associé comme jamais aux courants picturaux européens progressistes, et parfois il est très intéressant de trouver des parallèles entre les œuvres diverses et toutes les mouvances du monde l’art. Il vient aussi à l’esprit en qualité de couple estimable un autre que celui de Sonia Delaunay, avec une artiste pas moins célèbre, Varvara Stépanova, ayant travaillé à cette époque en Russie.
L’exposition actuelle est une analyse très détaillée et approfondie de l’œuvre de Sonia Delaunay. Sans doute, précisément liée à cette austérité presque scientifique de la conception, la scénographie de l’exposition est dénuée de toute la théâtralité à la mode ces derniers temps, de cette sorte de séduction du public. Cependant, l’art de Delaunay n’a pas besoin d’effets décoratifs supplémentaires.
Notez que les énormes toiles dans le style de l’orphisme, faites par Robert Delaunay, sont exposées à l’entrée de l’exposition principale du musée. Il est bon de mentionner que le Centre Pompidou n’est pas en reste et a décidé de montrer, parallèlement à l’exposition rétrospective de Sonia Delaunay, les travaux de son mari pas moins talentueux. Et si l’exposition au Palais de Tokyo s’intitule « Les couleurs de l’abstraction », celle consacrée à Robert Delaunay, porte sur l’autre caractéristique importante de l’orphisme, les « Rythmes sans fin ».
L’exposition «Sonia Delaunay, Les couleurs de l’abstraction » dure jusqu’au 22 février (http://www.mam.paris.fr/en/expositions/exposition-sonia-delaunay).
L’exposition « Robert Delaunay, Rythmes sans fin» est ouverte jusqu’au 12 janvier (https://www.centrepompidou.fr/cpv/resource/cjGRbr/rgGo4r).
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