Boris Grebenchikov de retour à Paris
Le 10 février, la célèbre Librairie du Globe a organisé une rencontre entre Boris Grebenchikov et ses admirateurs. Celle-ci coïncide avec la sortie de son nouvel album Boris Grebenchikov, Anthologie 1995—2013 (label Buda Musique) et son concert le 13 février au Théâtre de la Ville à Paris.
Boris Grebenchikov est auteur, chanteur et compositeur. Anthologie est une collection des chansons les plus belles et les plus populaires de la rock star russe la plus marquante de ces trente dernières années : un bilan original avant son soixantième anniversaire et son concert à Paris. Bien que Grebenchikov avoue modestement ne pas avoir été invité à se produire en Europe ni n’être particulièrement connu en Occident, le groupe The Band, qui a souvent accompagné Bob Dylan et qui a enregistré avec Grebenchikov beaucoup de chansons de l’album, prouve clairement le contraire.
Lors de sa rencontre avec ses admirateurs, Grebenchikov (surnommé BG) était, comme toujours, calme, souriant et portait un jean usé et des lunettes sombres. Des nombreuses rencontres organisées au Globe avec des hommes célèbres de la culture russe, celle-ci a certainement été la plus chaleureuse et la plus émouvante. Peu d’hommes ont rencontré un si grand nombre d’admirateurs, des mélomanes parisiens de vingt ans aux soixantenaires qui ont grandi avec les chansons de BG. Ceux qui n’avaient pas de chaises se sont assis par terre ou dans les escaliers ; les applaudissements ont été tonitruants ; les rires ont fusé presque tout au long de la rencontre ; les questions ont été vives et sincères, allant jusqu’à « Comment vont vos petits-enfants ? » La grande star a elle-même beaucoup plaisanté et souri, s’adressant au public par « Les gars » ou « Mes chers amis » ; c’est pourquoi cette présentation de disque ressemblait plutôt à une rencontre avec le Père Noël, dans le bon sens du terme.
Avec son habituel sens de l’autodérision, BG s’est prononcé sur la question de la traduction de ses chansons : « N’importe quelle traduction serait vide de sens, mais étant donné que mes textes n’ont aucun sens... » Pourtant, le chanteur a ensuite reconnu que même si cela lui plairait, il lui était impossible d’écrire ses chansons dans d’autres langues, et que l’ignorance de la langue française est l’un des plus grands regrets de sa vie.
Malgré son âge considérable, Grebenchikov est en pleine forme et d’une énergie touchante. Ainsi, questionné sur ses projets à Paris, il a affirmé qu’il ne ferait que répéter. Du reste, puisqu’il a dévoilé que son peintre préféré était Claude Monet, il est tout à fait possible qu’un de ses admirateurs parvienne à rencontrer son idole au Musée d’Orsay.
Bien entendu, une partie des questions concernait les relations de BG avec la Russie d’aujourd’hui, le pouvoir et les événements actuels. Si Grebenchikov a parfois répliqué avec son ironie habituelle (« Même le pouvoir actuel n’est pas assez fou pour m’inviter à chanter aux JO de Sotchi »), il a répondu à beaucoup de questions avec grand sérieux, en particulier sur le fait que manifester son soutien (par exemple aux prisonniers du 6 mai) par des paroles creuses ne peut rien changer et qu’il faut des actions réelles : « Parce que nous bavassons, rien ne change ». A la question ironique sur la retraite, le titre d’artiste du peuple et la reconnaissance de l’Etat, BG a répondu par une question : « Mais quel lien ai-je avec l’Etat russe ? »
Grebenchikov a parlé de sa relation avec le public de façon assez détaillée. D’après lui, l’artiste n’a pas le droit d'imposer son point de vue, chaque spectateur et auditeur doit avoir sa propre perception. En outre, il lui semble que, de manière générale, le public en province est bien plus agréable, plus profond, plus attentif et plus intéressant, et qu’il est plus dur de trouver des gens convenables dans la capitale, bien qu’il y en ai aussi, bien sûr.
Pour finir, BG a fait part de ses passions actuelles. En ce moment, son poète préféré est Joseph Brodsky, avec ses grandes « Stances à Augusta », et son groupe favori parmi les derniers arrivés est Kino. BG a toutefois précisé qu’il y avait en ce moment certaines personnes qui faisaient de la bonne musique mais n’a pas voulu citer de nom pour ne pas offenser les nombreux médiocres.
Le secret de Boris Grebenchikov réside probablement dans sa simplicité extraordinaire et sa curiosité pour la vie, un « univers infini de pensées », grâce à laquelle il est parvenu il y a longtemps à créer une musique absolument excellente. La question du sens de la vie a été l’une des plus importantes de cette rencontre, mais pour BG, « la vie est infiniment plus complexe que n’importe quel sens ».
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