90 ans, le chiffre est en soi impressionnant, il impose le respect.

Le 13 décembre à Paris, on a fêté les 90 ans de l’Union de la Garde, dont le nom officiel est « Association du Souvenir de la Garde Impériale ».

В резиденции посла России во Франции | A la résidence de l'ambassadeur de la Russie en France. Photo: Elena Iakounine

En 1924, l’Union de la Garde a été fondée en exil (qui aurait pu la fonder en Russie soviétique ?). Le jour du 13 décembre n’a pas été choisi par hasard, en effet c’est le jour de naissance de l’apôtre Saint-André le Premier appelé, le saint protecteur de la marine russe.

En l’honneur de Saint-André le Premier appelé, Pierre le Grand lui-même a instauré la distinction principale de la Russie impériale (l’Etoile de l’Ordre de Saint-André) qui fut rétablie en 1998 comme la plus haute distinction de Russie. Il est inscrit sur l’étoile brillante de l’ordre : « Pour la Foi et la Fidélité ». Cette devise était le fondement des activités de l’Union, en exercice loin de la patrie, mais prêtant serment de toujours la servir.

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Les officiers russes ont légué cette devise à leurs enfants et à leurs petits-enfants, qui, en souvenir des générations passées, ont décidé de ne pas dissoudre l’Union et de le transformer en une Association du souvenir des gardes. Les descendants français actuels des gardes russes proclament leur foi dans la langue, la culture et les valeurs de base russes, leur foi dans ce que leurs pères ont conservé à l’étranger.

L’Union a été conçue par le baron Pierre Nikolaïevitch Wrangel, au cas où la possibilité de renverser la puissance soviétique se présenterait. Elle a vu le jour immédiatement après la création de l’Union générale des combattants russes (ROVS) et en est devenue une partie intégrante. Quand après la deuxième guerre mondiale, il est devenu clair que le régime ne s’effondrerait pas, l’Union de la garde est devenue le refuge patriotique pour les officiers qui n’avaient pas d’unions régimentaires propres.

90 ans après, sur proposition de l’ambassadeur de la Fédération de Russie en France A.K. Orlov, il a été décidé de célébrer le jubilé dans l’ambassade des tsars russes, un immeuble acquis au 19^ème siècle par Alexandre II, et maintenant résidence de l’ambassadeur russe.

Гобелен и канделябры помнят последнюю русскую императрицу | Ce gobelin et les candélabres sont du temps de la dernière impératrice de la Russie. Photo: Elena Iakounine

Les salles de cet hôtel particulier de la rue parisienne de Grenelle ne se souviennent pas seulement des ambassadeurs royaux, mais aussi des têtes impériales qui séjournant en France pour une visite officielle, s’y installaient.

Le jubilé de l’Union a été commémoré comme il se doit, avec la sortie des étendards des gardes ainsi que la prière solennelle en souvenir des morts et pour la santé de l’assistance. A la célébration de Paris on a invité le chœur du monastère Ipatiev de la ville de Kostroma, celui-là même d’où on a appelé à régner Mikhaïl Romanov, le fondateur de la dynastie des tsars.

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A la soirée, a prononcé un discours le prince Alexandre Alexandrovitch Troubetzkoy, qui, étant le fils d’un officier du régiment à cheval des grenadiers, a assumé en 2003 la fonction de président de l’Association. 

Troubetzkoy a rappelé les paroles prophétiques du baron Wrangel : « Je crois fermement que la Russe ressuscitera ». Un autre exilé encore avait la foi en la partie, le philosophe et publiciste Ivan Ilyin, qui considérait que, malgré toutes les difficultés, le peuple russe trouvera sa voie.

« Maintenant on attaque la Russie, — a déclaré le prince, — parce qu’elle est fidèle aux anciennes valeurs spirituelles et à ses traditions séculaires. »

Контр-адмирал Р. Новоселов и князь А.Трубецкой | Contre-amiral R.Novoselov et le prince A.Troubetzkoï. Photo Elena Iakounine

En 2014, en Russie, on a célébré le centenaire de la Première guerre mondiale, à Moscou a été inauguré un mémorial aux héros russe de cette guerre. Et l’idée de ce mémorial est née justement à Paris, dans les salles de l’hôtel particulier russe dans la rue de Grenelle. Ainsi, Troubetzkoy se souvient qu’ils ont avec le prince de N.D. Lobanov-Rostobsky proposé à l’ambassadeur A.K. Orlov leur idée d’écrire une lettre à Poutine sur le fait qu’il n’existe pas en Russie un mémorial digne de ce nom dédié aux citoyens russes, morts il y a cent ans. La lettre, écrite avec l’en-tête de l’Union de la Garde, est arrivée jusqu’à son destinataire.

Беседуют президент АО «Русский Красный Крест» С.Капнист и князь Н.Лобанов-Ростовский. Справа директор Музея казаков А.Бобриков | S.Kapniste, président de la Croix-Rouge russe et le prince N.Lobanov-Rostovsky. A leur droite A.Bobrikov, dirécteur du Musée des kozaks. Photo Elena Iakounine

 A la cérémonie de Paris on a présenté la monographie en trois volumes tout juste parue, « La Première guerre mondiale : les mythes historiographiques et la mémoire historique. » Le travail de ce grand collectif d’historiens éclaircit beaucoup de faits obscurs, répond à la question qui, et en vue de quoi, a déclenché cette « deuxième guerre patriotique » et non « impérialiste » comme elle fut longtemps appelée pendant des décennies. L. P. Rechetnikov, directeur de l’institut de Russie des relations stratégiques (РИСИ), a exprimé à la soirée sa conviction que pour la Russie la guerre s’est terminée le 1^er mars 1917. Et la Russie n’aurait en aucune manière perdue puisque cette guerre se déroulait aux frontières du pays et qu’en plus un cinquième de la Turquie a été conquise par l’armée russe. « Ceux qui ont perdu la guerre, sont ceux qui ont pris le pouvoir en Russie », — ainsi conclut son récit Rechetnikov.