Pourquoi les intermittents sont-ils en colère...
La bohème française est vent debout : le 28ième festival de Montpellier, « le Printemps des comédiens », est au bord de l'explosion depuis son ouverture, le 3 juin dernier ; le plus prestigieux des festivals d'été, le festival d'Avignon est lui aussi menacé par les grèves, ainsi que le festival d'Art Lyrique d'Aix en Provence. Et d'autres encore.
Que se passe-t-il ? Pourquoi cette colère de la bohème française ?
L'expliquer n'est pas si simple. La France s'est dotée d'un régime «spécial» des intermittents du spectacle. Ou plutôt, 8 et 10 points ajoutés à la convention générale de l'allocation chômage. Ce régime prend en compte les conditions particulières de travail des intermittents — ensemble des personnels artistique et technique du spectacle vivant, du cinéma et de l'audiovisuel (caméramans, costumiers, éclairagistes, etc., etc.), ils cumulent de nombreux contrats précaires au lieu d'une place stable, et temporaires (de un jour à plusieurs mois).
Selon la convention en vigueur à l'UNEDIC (Union nationale interprofessionnelle de l'emploi dans l'industrie et le commerce) pour accéder au statut d'intermittent, il faut travailler 507 heures dans une période de 10 mois/10mois et demi. Les conditions d'attribution de l'allocation chômage sont alors beaucoup plus avantageuses : l'indemnisation peut aller jusqu'à 5475 euros.
Le système prévoit qu'en cas de baisse du salaire, une caisse spéciale verse le complément pour assurer à l'intermittent un revenu stable et la disponibilité pour l'emploi. Pour prendre en compte le caractère particulier, instable, de son travail. Entre deux périodes de réalisation de projets, il peut s'écouler des jours, des semaines ou des mois de préparation, répétitions ou simplement de maturation créatrice, payés par personne et qui n'ont rien à voir avec la journée de huit heures ou la semaine de cinq jours.
Ce soutien social, quasi sans équivalent dans le monde, à été imaginé pour améliorer les conditions de vie des artistes, régulariser leurs revenus et leur permettre de vivre de leur profession, sans la peur permanente du lendemain.
Le problème, c'est que le « fromage » s'est avéré trop attirant et les souris trop malignes. Il peut arriver que cette allocation substantielle soit attribuée à ceux qui n'y ont pas droit : des «heures» peuvent être comptabilisées en travaillant quelques heures «au black» à Disneyland, déguisé en Mickey, par exemple. Ce que ne manque pas de faire quelques français dégourdis. Peut-on dire qu'il s'agit là du métier d' «acteur» pour qui a été pensé le statut d'intermittent ?
Un autre mauvais usage est monnaie courante dans de grandes entreprises, comme la télévision, où des emplois permanents sont couverts par des CDDU (emploi à durée déterminée ayant statut d' intermittent du spectacle). Pour l'employeur c'est tout bon, car il paie moins de charges et l'allocation chômage complète le salaire.
A noter que souvent ceux pour qui a été créé ce statut n'en bénéficient pas car, ou bien leurs « heures » ne sont pas déclarées, ou bien ils ne savent pas les déclarer. Ne sont ils pas à l'écart du monde réel, et n'est-ce pas pour cela qu'ils sont des artistes ?
Le nombre des intermittents a tellement grandi d'année en année — en 1984, ils étaient 9060 , en 1991 41038 et en 2013 106000 — que la caisse d'assurance chômage s'est retrouvée en crise.
A l'automne dernier, le MEDEF (la plus importante organisation du grand patronat) a proposé de supprimer purement et simplement l'allocation, ce qui a provoqué dès novembre des manifestations des intermittents.
Toutefois, après de nombreuses polémiques un accord fut signé le 22 mars dernier à l'UNEDIC, cœur du dispositif d'indemnisation des chômeurs ; cet accord maintenait le statut d'intermittent mais avec quelques corrections qui réduisent de fait leurs droits.
La dernière réforme de ce statut a eu lieu en 2003. En réduisant de 12 à 10 mois le temps pour accomplir les 507 heures, il a dégradé notablement les conditions de travail des intermittents. Cela avait suscité une vague d'indignation dans l'ensemble du monde de la culture, et l'annulation de nombreuses festivités, dont le festival d'Avignon, pour la première fois de son histoire. Aujourd'hui, la même menace couve: depuis 3 mois, les intermittents sont vent debout contre l'accord proposé et ses correctifs.
Grèves, assemblées générales, interruptions de spectacles, début de «La Traviatta » retardé début juin, réunion et « conversation » des intermittents avec le public à l'opéra Bastille, et, surtout, la menace d'annulation qui pèse sur les plus gros festivals de l'été, tout cela contraint le gouvernement à engager le dialogue. Mais pour le moment, c'est plutôt un dialogue de sourds.
Malgré les mauvais usages qui en sont faits et ses limitations, ce statut d'intermittent du spectacle permet à la France d'avoir une quantité incroyable de spectacles de théâtre, de musique, d'initiatives artistiques de très grande qualité. C'est unique au monde.
Вот живешь живешь в России с ее проблемами и даже не догадываешься, что может так взбудоражить мир искусства Франции. А ведь здорово придумана эта «касса взаимопомощи» И что особенно удивительно — жульничество для получения выплат. Это уже совсем как у нас
Ну зачем же вы так Микки-Мауса в жулики записали? Ведь не пришло в голову на территории Франции жуликом Обеликса назвать. А мышку – можно, да?
Насчет невероятно высокого качества — это пожалуй перегиб. Найти хороший театральный спектакль в Париже — это надо потрудиться!