Le rédacteur en chef de la revue « Valeurs actuelles », Frédéric Pons, a présenté son nouvel ouvrage « Poutine » qui est sorti récemment chez Calmann-Lévy, dans les locaux de l’IDC Europe.

Parmi les nombreux participants à la conférence l’« Observatoire russe » était présent. Voici les moments les plus intéressants.

Photo: Ekaterina Gadal

« Ce livre est parti d’une frustration par rapport à mes collègues journalistes qui se répètent les mêmes caricatures, souvent les mêmes erreurs. J’ai été frappé de voir que la machine médiatique tournait en boucle sur le sujet de Poutine. L’un l’a dit, un deuxième l’a répété etc. Mais quand on regarde aux sources on tombe sur une approximation qui est prise pour une vérité révélée. J’ai essayé d’aller au-delà de toutes ces courants médiatiques et Poutine m’a paru très intéressant à étudier parce qu’il faut que l’Europe et la France puissent travailler avec la Russie en bonne intelligence et en tous cas avec les bonnes clés de compréhension et ce n’est pas en multipliant des caricatures qu’on pourra comprendre ce qui est Vladimir Poutine, ce qu’il veut, où il va » — a dit l’auteur au début de son intervention.    

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Q : Ma question est au sujet du caractère de Vladimir Poutine. Vous l’avez présenté comme quelqu’un qui vient de Saint Petersbourg et qui a des spécificités saint pétersbourgeoises, pensez-vous que le fait qu’il soit de Saint Petersbourg , fait qu’il puisse être plus ouvert sur l’Europe, plus européen que si il était de Moscou ou d’ailleurs ?

R. Je ne suis pas tout à fait sûr. C’est vrai que sa formation universitaire à Saint Petersburg son goût des langues étrangères, sa culture allemande particulière qui à l’époque, chez les élites de l’Union Soviétique, était originale, indique un certain tropisme vers l’étranger, vers l’extérieur, une ouverture vers l’Europe Occidentale. Mais en même temps je ne suis pas sûr, car je n’ai pas lu de textes qui montreraient cette ouverture particulière et supérieure à la moyenne de Poutine vers l’Occident. A la limite j’ai parlé de judo, il a été très marqué par ses lectures des maitres en arts martiaux japonais et des maitres en arts martiaux russes qu’il a pratiqués. J’ai insisté sur cet aspect au début. 

Q. Ma question concerne l’aspect démographique, la Russie n’est pas seul pays de l’Europe qui se trouve devant un problème démographique et au même moment des chinois s’infiltrent assez massivement dans l’Est de la Sibérie. Je crois il y a une politique familiale assez volontariste dont les résultats sont à ma connaissance assez inégaux mais peut-être pouvez vous nous en dire davantage ?     

R. Il semble bien que l’effondrement démographique de la Russie soit enrayé. Les derniers chiffres de la natalité sont plutôt favorables mais est-ce que cela va se vérifier sur la durée ? On ne peut pas le dire mais on peut relier effectivement cette alerte rouge démographique en Russie à la politique familiale de Poutine. Un certain nombre de pays occidentaux voient leur démographie se fausser et essaient de la compenser par l’immigration. Poutine procède autrement. Pour cela sa politique est intéressante, il mène la défense d’une vraie famille contre toutes les attaques qui peuvent détruire la famille, ce milieu naturel dans lequel les enfants peuvent apparaître, et cela explique cette politique très volontariste qu’il a au sujet de la protection de la famille et de l’interdiction de la propagande homosexuelle aux mineurs qui a choqué certains en l’Occident. Pour moi il s’agit juste d’une partie d’une politique familiale beaucoup plus vaste et intéressante à suivre pour un pays qui ne se résigne pas à sa disparition démographique. En ce qui me concerne, l’interdiction de la propagande homosexuelle pour protéger les mineurs ne me choque pas dans le cadre d’une politique familiale plus vaste

Q. Est-ce que le président Poutine n’aurait pas à l’esprit que finalement pour la Russie l’Ukraine n’est pas tellement un pays étranger mais plutôt une partie de la Russie ?

R. Poutine est un centriste : il est au centre de rapports de force entre deux courants au sujet de l’Ukraine. Il y a d’un coté ceux qui disent qu’il faut arrêter de hausser le ton avec l’Ukraine et l’Occident et prendre en compte l’indépendance de l’Ukraine. De l’autre cote, il y a des partisans de la rupture et de la ligne dure qui sont en train de prendre le dessus. Poutine est donc soumis à la pression de certains comme Glaziev qui militent en ce moment pour une phase nouvelle qui entraînerait sans doute un durcissement des rapports avec l’Occident. Leur objectif est de marquer un avantage décisif en prenant la ville de Marioupol et en obtenant ainsi un corridor terrestre entre le territoire de la Russie et la Crimée. Certains dans les cercles dirigeants sont donc favorables à cette option militaire pour saisir ce corridor. Pour l’instant Poutine semble n’avoir pas encore tranché.

La soirée s’est terminée par une séance de dédicaces.