La Russie au Salon du livre de Paris
« Tout homme a deux patries : la sienne et puis la France » disait l’inventeur du paratonnerre Benjamin Franklin.
Dans cette « patrie de l’amour », trente auteurs russes organisent un véritable débarquement culturel prévu en mars 2018, et pour cause : la Russie a été nommée pour la deuxième fois depuis 2005 invitée d’honneur pour cette 37e édition du Salon du livre de Paris.
Ces événements, considérés comme l’une des plus importantes et des plus remarquables manifestions liées aux livres en Europe, auront lieu comme chaque année à Paris Expo Porte de Versailles.
Par ailleurs, si l’on inverse les deux derniers chiffres de l’année 2018, cela nous donne 81, date de la première édition de l’un des plus importants événements culturels à l’échelle mondiale. Comme le soulignent les organisateurs, « le Salon du livre de Paris, créé en 1981, est la plus grande manifestation culturelle et médiatique, jouant un rôle similaire à celui du festival de Cannes pour le cinéma».
Le Salon du livre 2018 deviendra alors à juste titre le centre de la « saison de la littérature russe ».
En attendant le grand jour, la Librairie du Globe à Paris a tenu une conférence de presse avec les organisateurs russes et français du programme « La Russie, invitée d’honneur du Salon du Livre à Paris ».
Ont participé à la conférence Vincent Montagne président du SNE (Syndicat National de l’Edition), l’interprète Anne Coldefy-Faucard experte en littérature russe, le directeur exécutif de l’Institut de traduction Evguéni Reznichenko, l’écrivain Evguéni Vodolazkine, ainsi que des représentants des médias français et russes.
À quelques pas de la magnifique place des Vosges située au cœur du quartier du Marais, les participants se sont retrouvés au Globe qui s’est transformé en véritable berceau de la culture russe.
Après le cocktail chaleureusement offert par le propriétaire de la librairie, l’éditrice N. Tyurina et le directeur de la librairie François Deweer, Vincent Montagne a ouvert la conférence :
« Les liens historiques, culturels et littéraires entre la France et la Russie sont privilégiés, uniques même. Nos littératures, et au-delà nos cultures, s’écoutent et se répondent. L’édition 2018 du Salon Livre Paris célébrera ce dialogue intense entre les lettres de nos deux pays…», a déclaré le président du SNE.
Les nominés et les sélectionnés
« Sélectionner les 30 meilleurs auteurs pour le «printemps en russe» à venir est une tâche particulièrement délicate », a déclaré Anne Coldefy-Faucard dans son discours. « Le processus afin d’établir cette liste est très compliqué. En effet, la liste elle-même doit refléter les tendances contemporaines dans la littérature du pays invité… »
En principe, trois aspects contradictoires sont compris dans l’expression « événement culturel ».
Il y a tout d’abord l’aspect médiatique. Porte de Versailles est un lieu culturel unique qui permet de représenter le plus possible le pays invité d’honneur du Salon.
Ensuite, il y a l’aspect commercial. Il est bien connu que le Salon du livre à sa propre spécificité qui consiste à prendre en compte les goûts et le choix du public français, et donc également les éditeurs français qui sélectionnent les œuvres des auteurs ou leaders de la littérature russe contemporaine.
Bien entendu, le dernier aspect s’inscrit tout en haut de la liste : l’aspect littéraire. C’est pourquoi le thème principal abordé lors de la conférence de presse à la librairie du Globe tournait autour des futurs participants au Salon.
Quelles surprises nous réserve la Russie en termes de littérature? Comment est-elle représentée et par qui ?
Il se trouve qu’au début du nouveau millénaire, le groupe d’auteurs tous des trentenaires a fait l’irruption dans la littérature russe. Ces auteurs sont des citoyens russes, dont la vie n’a véritablement commencé que dans les fameuses années 1990. Le poids de la censure, de l’oppression, des files d’attentes… la « génération non fustigée » a eu la chance de ne pas connaître tout ça.
Ainsi, 30 auteurs venant de Russie sont invités au Salon du Livre 2018. La liste des « nominés » comprend aujourd’hui onze personnes. Parmi ces auteurs proposés, certains sont tout de suite reconnaissables, comme Oulitskaïa, Bykov, Pelevine, Sorokine ; tandis que d’autres, tels que Ganieva, Osipov ou Dmitriev, sont encore méconnus du lecteur français (pour l’instant).
Lors de la conférence de presse, les noms des « élus », ceux qui ont déjà été sélectionnés pour participer au Salon du livre, ont été annoncés ; 19 personnes sont sélectionnées pour le moment.
C’est Narinai Abgaryan (Arménie) qui ouvre la liste des auteurs sélectionnés. Elle présente au lecteur russe un nouveau genre à la mode : un roman autobiographique Manyunya (éd. Astrel Spb, 2010). Yuri Bruida, qui se considère comme un « prisonnier russe en captivité allemande», se trouve également dans la liste des auteurs sélectionnés ; plusieurs de ses livres ont été traduits en français, et ce notamment par les éditions Gallimard qui l’ont introduit au lectorat français. Figure également dans la liste Serguey Chargounov, un jeune membre de la Douma d’Etat et collaborateur de Prilepine issu du groupe des « enragés » (d’après le titre du livre de Monique Slodzian Les enragés de la jeune littérature russe).
Il y a également des auteurs très différents, comme le lauréat du Prix Booker Vladimir Charov, dont les livres ont été traduits en plusieurs langues, et naturellement en français (Les répétitions, Avant et pendant, etc.). Olga Slavnikova est une auteure éminente russe ayant reçu de prestigieuses récompense, dont le prix Booker russe en 2006. On trouve également A. Guelassimov, l’écrivain au style raffiné, ou encore le post-moderne A. Sguenirev, etc.
Sur le reste de la liste figurent : M. Galina, V. Golovanov, G. Iakhina, A. Ivanov, V. Levental, V. Remizov, R. Sentchine, Marina Stepnova, Y. Vagner, A. Varlamov, E. Vodolazkine.
Mais quelle est l’essence de cette sélection « artificielle » ? La réponse est simple. Les écrivains contemporains empêchent le lecteur de supprimer la lecture de leur vie pour de bon. C’est notamment grâce à eux que le mot « artiste », c’est-à-dire l’artisan, n’est pas encore un euphémisme à connotation plus ou moins négative pour désigner quelqu’un de « béat » ou d’ «obsédé». Après tout, si le monde ne possédait pas ces « béats et obsédés », la logique des choses ferait que la recherche de la beauté et l’amour du discours disparaitraient en peu de temps et à tout jamais.
Comme l’a si bien exprimé l’écrivain Evguéni Vodolazkine :
« La littérature russe de ces dernières années est devenue nettement plus métaphysique. Elle redevient cette littérature à laquelle le monde entier est habitué, celle de Tolstoï, Dostoïevski, Tchekhov. Si vous voulez connaître la Russie plus en profondeur, lisez sa littérature. »
Plus d'information sur le Salon: https://www.livreparis.com/Presse/Visuels/
Photos Studio Photo Lada
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